Quel régime alimentaire pour demain?

Quel régime alimentaire pour demain nourrir convenablement les 10 milliards d’habitants du globe en 2050 tout en préservant la planète? C’est à cette question fondamentale que répond une étude fouillée publiée début janvier par la très sérieuse revue médicale the Lancet associée à l’ONG EAT. La bonne nouvelle apportée par les scientifiques est que c’est possible avec une nourriture saine et équilibrée. La mauvaise nouvelle est que le régime alimentaire proposé est assez tristounet. Le régime proposé n’est certes pas végétarien. Mais il propose une diminution plus que drastique de notre consommation de viande rouge largement remplacée par graines et noix riches en protéines végétales. Devrons-nous radicalement changer nos habitudes alimentaires?

Quel régime alimentaire pour demain : le constat alarmant des scientifiques

A l’instar des experts du GIEC, les 37 scientifiques réunis par le Lancet et l’ONG EAT commencent leur rapport par un cri d’alarme. Notre modèle actuel n’est pas pérenne. « Nous n’arrivons plus à nourrir notre population de façon saine en préservant les ressources de notre planète. »

Ils dénoncent un modèle actuel qui nous emmène dans le mur au niveau environnemental et qui en plus ne permet déjà pas de nourrir convenablement l’humanité : « plus de 820 millions de personnes souffrent de malnutrition et de plus en plus consomment un régime alimentaire malsain qui contribue à une mortalité précoce ». Ce modèle est celui de l’agriculture intensive qui a conduit à l’absurdité des usines à poulet et à la faillite le groupe Doux que nous avions évoquée dans un précédent article.

La frugale proposition des scientifiques pour un régime alimentaire équilibré, sain et écologique 

Leur constat est malheureusement implacable et m’a personnellement interpellé. Quel régime alimentaire pour demain : clairement pas celui que nous avons aujourd’hui. Je me suis donc intéressé aux solutions proposées par nos scientifiques. Ils nous proposent le régime alimentaire ci-dessous.

Pas de véritable surprise au premier abord. Ils sont en phase avec les recommandations de ma Maman adorée, à savoir moins de viande et plus de légumes. Tout ça pour ça! Et puis dans les bonnes nouvelles, les produits laitiers figurent en bonne place dans ce régime. Le pain beurre ne semble pas condamné à mort. Les scientifiques de l’ONG EAT parlent d’ailleurs d’un retour au régime méditerranéen traditionnel. Ça serait somme toute le retour au bon sens après l’orgie industrielle.

Mais il faut y regarder de plus près. Ce régime est frugal, vraiment frugal. La photo ci-dessous présente une consommation type pour une journée entière. J’ai cru au premier abord qu’il s’agissait d’un seul repas. On ne parle pas de moins de viande mais de beaucoup moins de viande : 14 grammes de viande rouge par jour, 30 grammes de volailles. L’entrecôte XL 330g d’Hippopotamus représente 24 jours de consommation de viande rouge d’un coup. La viande rouge pèse lourd dans un bilan carbone

Une journée de régime alimentaire (source EAT-Lancet commission)


 

Quel régime alimentaire pour l’être humain : changer nos habitudes, manger des noix et des graines

Pourtant ce régime alimentaire apporte bien les 2500 calories journalières dont nous avons besoin. Il repose en fait largement sur la consommation de « nuts » (diverses noix, noisettes et autres graines) sources de protéines venant se substituer aux protéines animales, avec à la clé un bénéfice environnemental majeur. Les repas complets en poudre FEED très à la mode répondent à ce principe. On y retrouve également des avocats

La perspective de remplacer une bonne côte d’agneau ou un bon rôti de boeuf par des pistaches ou des graines ne m’enchante guère. Alors je vous laisse imaginer la réaction de nos amis américains à l’idée de diviser par 6.5 leur consommation de viande rouge comme recommandé par l’étude. Ils viennent de consommer 1.3 milliards de chicken wings à l’occasion du superbowl. Je vois déjà Donald Trump casquette rouge « Make America Great Again » vissée sur la tête dénoncer un nouveau complot contre l’American Way of Life entre deux bouchées d’un énorme burger.

Dès lors comment faire. Les scientifiques de la commission EAT/Lancet ne seraient-ils que des technocrates ascètes complètement déconnectés de la réalité et des aspirations des peuples? Leur rapport n’a pas manqué de déclencher une levée de boucliers. La journaliste du NY Time Nina Teicholz auteur du best-seller The big fat surprize ardente défenseur du burger accuse EAT/Lancet de partialité. Selon elle, 80% des chercheurs recrutés étaient en phase avec les idées végétariennes/végans avant de rejoindre le projet EAT/Lancet. Bref ce rapport serait en fait une action déguisée du lobby vegan. Nos scientifiques mangeurs de « nuts » have turned nuts ironisent leurs détracteurs.

Le mouvement est enclenché : moins de viande, plus de bio et de filières courtes

Les faits sont pourtant têtus et notamment l’impact environnemental du modèle agricole actuel. Alors comment changer nos habitudes? Je suis assez sceptique sur la recommandation des chercheurs d’une politique mondiale pilotée par l’ONU. Cela rappelle malheureusement les difficultés concernant le réchauffement climatique.

Je pense que l’évolution des comportements viendra d’en bas, du consommateur. Le secteur a déjà commencé à bouger. La consommation de viande a commencé à baisser. Le bio et les filières courtes sont en plein essor. Nous parlions dans notre alphabet 2018 du succès de l’application Yuka avec ses 5 millions d’utilisateurs qui note la qualité nutritionnelle des produits vendus dans la grande distribution et fait bouger les lignes. Sans oublier le succès de c’est qui le patron, la marque du consommateur qui cherche à concilier qualité du produit et rémunération équitable pour le producteur. Et puis entre insectes et cuisines note à note, la science nous réserve quelques surprises. Nous en reparlerons.

Beau mais frugal (Source EAT-Lancet commission)

Quant à moi en attendant, je ressors ébranlé de cette plongée dans le rapport EAT/Lancet. Sans aller jusqu’au régime recommandé, je crois que je vais enfin écouter les bons conseils de ma Maman : moins de viande, plus de légumes.

Mise à jour du 18/02/2019 : révolution végétarienne chez Nestlé

Révolution chez Nestlé. La multinationale de l’agro-alimentaire annonce la cession probable d’une de ses marques phare : la marque de charcuterie Herta. « Le marché de l’alimentation végétale est beaucoup plus prometteur que celui des aliments carnés.«  a déclaré son Directeur Général Mark Schneider. L’entreprise suisse a donc également décidé de se lancer sur le marché des burgers vegan avec Impossible Burger, un burger végétalien dont l’apparence et le goût se rapprochent au maximum d’un burger classique à la viande de boeuf

Mise à jour du 01/09/2019 : le GIEC convergent avec les recommandations du rapport EAT/Lancet sur le régime alimentaire de demain

Le rapport GIEC du GIEC publié cet accorde une place importante à l’alimentation de demain. Sans surprise, les conclusions du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat sont très convergentes avec celles du rapport EAT – Lancet. Agriculture, sylviculture et autres usages de la terre notamment l’élevage représentent 23% des émissions de gaz à effet de serre. 

Le rapport estime le gaspillage alimentaire entre 25 à 30% de la production totale. Il recommande de faire de sa réduction une priorité d’action majeure. Il insiste également sur l’impact fort en termes d’émission de gaz à effet de serre de l’élevage de bovins et d’ovins. En effet, les animaux principalement les vaches et les cochons, rejettent énormément de méthane dans l’atmosphère. Ce gaz a un effet 25 fois plus important que le CO2 sur le réchauffement de la planète. Le GIEC ajoute alors « la consommation de régimes alimentaires sains et durables, tels que ceux basés sur les céréales secondaires, les légumineuses, les légumes, les graines et les noix offre des opportunités majeures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre« .