Les runners : les courses événementielles

La course est le sport individuel par excellence. Vous vous battez contre vous-même, isolé dans votre bulle, casque sur les oreilles. Paradoxalement c’est ce sport qui donne lieu aux plus grand événements collectifs, avec par exemple, plus de 50.000 participants pour le marathon de New York. Je crois que personne n’aime courir seul. C’est notre côté grégaire. La course événementielle serait l’aboutissement du lien social de notre temps : être ensemble côte à côte, les plus nombreux possible mais sans se parler. (je plaisante bien sûr !). Pour le dernier article de notre série consacré aux runners, je vous propose de nous intéresser à ces grandes courses qui rassemblent d’immenses foules.

Course événementielle : d’immenses rassemblements fun

Ces immenses rassemblements me fascinent. Au départ, ces événements étaient sérieux. Le marathonien s’entraînait pendant des mois pour faire LA course le jour J. Ses proches l’attendaient le long du parcours et venaient applaudir l’exploit. Mais tout ça manquait de fun. Les sponsors et le marketing sont arrivés et tout a commencé à changer. Méga-sono sur le parvis du Champ de Mars, déjà plus fun : après l’effort, le réconfort. Mais la course quand même… Si on faisait la course en se faisant asperger de poudre colorée ? Encore plus fun. Et en plus à l’arrivée les DJ Extravadance t’attendent. Super méga-fun. 70% de filles. YEESSS!!!! Et si on faisait un concours de T-shirt mouillé ? Ça c’est le bubble day. Là le côté course est réduit au minimum et entre deux foulées, on passe dans des bains géants de bulle. Mes filles ont adoré.

Des courses réservées aux femmes

Féminisation et marketing sont à mon sens à l’origine de ces manifestations. Les femmes ont apporté à la course un sens du rythme, un goût du déguisement bien éloignés des préoccupations des austères coureurs du début. Ça n’est pas Redbull mais Sephora qui sponsorise la Color Run. Les marques ont vite vu dans ces événement un bon vecteur de communication. Il y a plein de choses à vendre (cf. la liste de shopping du runner dans le post précédent), et puis on s’associe à un événement associant effort et fun. La course évémentielle est un événement impliquant. Ces courses sont donc gavées de marketing. On y sent l’odeur de l’argent. Adidas a même créé des équipes de quartier animées via Facebook pour vendre ses chaussures. Je vous invite à lire cet article. Je trouve cette initiative à la fois géniale, mais tellement angoissante.

Toujours plus vite, toujours plus longtemps : du marathon à l’ironman

Il fallait que les hommes prennent leur revanche, remettre de la testostérone dans tout ça. Réussir le marathon devenait banal, trop facile. On a donc inventé l’Ironman : 4 km de natation, 180 km de vélo et un marathon en guise de sprint final. Ou encore l’Ultratrail, généralement plus de 100 km en milieu montagneux, la ballade en montagne avec le plaisir en moins : le sommet en est l’UTMB l’ultratrail du Mont-Blanc. Il s’agit là d’aller vraiment au bout de soi. Étrange occupation que celle d’aller au bout de soi : nous savons tous ce qu’il y a au bout de la route.

Je peux le comprendre dans les sports extrêmes : frôler la mort, la défier, pour une bonne décharge d’adrénaline. Mais là j’avoue que j’ai plus de mal. Jules Gaîté l’autre chroniqueur d’Etonnante Epoque est un fervent adepte de l’ultra-trail. Il défendra son point de vue avec le même enthousiasme

Tout le monde a loué Yohann Diniz ce marcheur fou. Presque christique, il est tombé trois fois lors de son 40 km marche, s’est relevé et a fini la course évacué directement au service de réanimation de l’hôpital de Rio. Les journalistes sportifs épuisés eux par des nuits de fête saluaient unanimement ce héros.

Le Mud Day course événementielle et bêtise

Mais la bêtise humaine étant sans limite, on inventa le Mud Day. La première fois qu’on m’en a parlé, j’ai cru à une mauvaise plaisanterie. Les participants effectuent un parcours de type militaire. Ils « s’amusent » à ramper dans la boue avant de monter un mur d’obstacle, puis se suspendent à des cordes au dessus d’une rivière de boue. Je les vois en treillis, maquillés comme des commandos. Ils arrivent trempés mais fiers à l’arrivée. Je me méfie des gens qui jouent à la guerre. Je les enverrai bien faire un petit tour du côté de Verdun. Ils se rendraient peut-être compte que nos aïeux y rampaient tragiquement dans la boue, et que malheureusement ça n’était pas un jeu.

Article pour aller plus loin sur le sujet du running : l’étrange record sur le marathon en moins de 2 heures d’Eliud Kipchoge