Coronavirus : chroniques du confinement semaine 1

Depuis dimanche, la France est officiellement au stade 3 de l’épidémie de coronavirus, synonyme de confinement chez soi pour l’immense majorité de la population. En une semaine, tant de choses ont basculé. Nous ne sommes collectivement plus les mêmes. Pendant cette période extraordinaire, Étonnante Époque vous propose une chronique quotidienne à retrouver sur les réseaux sociaux (Linkedin, Facebook). Ces chroniques du confinement racontent petites et grandes histoires vécues lors de cette période inédite qui nous bouleverse tous. Elles seront quand c’est possible délibérément optimistes portées par la ferme conviction que nous traverserons collectivement cette épreuve même si chaque jour qui passe est un saut dans l’inconnu. 

Chroniques du confinement JOUR 1 : où nous redécouvrons les propriétés de la courbe exponentielle et de la courbe logistique

Depuis jeudi, les courbes d’évolution de la maladie fleurissent sur Internet montrant la progression « exponentielle » de la maladie. Exponentiel, exponentiel, nous redécouvrons collectivement les propriétés mathématiques explosives de la courbe exponentielle.

J’ai trouvé particulièrement éclairant ce modèle mathématique simple :

Mj+1 = (p * n) * Mj où (Mj = nombre de malades le jour j, n nombre de personnes moyennes que rencontre une personne contaminée, p probabilité de contamination de chaque personne rencontrée) :

  • Pour que la progression ne soit plus exponentielle, il faut que p*n<1
  • On retrouve bien là l’objectif des politiques publiques : lavage de mains, tousser dans son coude & masques fait baisser p, le confinement fait baisser n.
  • Quand p*n<1 c’est qu’on a atteint le fameux sommet de la vague dont on parle tant ces derniers jours. La courbe exponentielle se transforme alors en courbe logistique, c’est ce qu’on appelle le point d’infléchissement

Pour l’instant avec un doublement du nombre de malades tous les 3 jours en France, on est plutôt sur p*n= 1.25 loin du point d’inflexion. Autre leçon de la courbe exponentielle, chaque jour perdu au départ coûte très cher à l’arrivée. On comprend dès lors pourquoi notre discipline collective dès maintenant est cruciale pour que le sommet de la vague ne dépasse pas la capacité de nos hôpitaux

Chroniques du confinement JOUR 2 : élections municipales ou le retour du syndrome du nuage de Tchernobyl

Hier nous avons été voter, avec gel hydroalcoolique et distances de sécurité mais malgré tout nous avons été voter. L’incohérence était flagrante. Restaurants et cafés fermés mais bureaux de vote ouverts comme si à l’instar du nuage de Tchernobyl le virus allait s’arrêter au seuil des urnes. Il est maintenant inévitable que le 2ème tour soit annulé.

La décision du maintien du 1er tour était d’emblée techniquement absurde. Emmanuel Macron l’avait bien compris mais une annulation était jeudi dernier politiquement inconcevable. Que n’aurait-on entendu sur un tripatouillage quasi-dictatorial si l’élection avait été reportée! La décision fut éminemment politique et on voit là toute la limite du discours « nous ne faisons qu’appliquer les avis d’un comité d’experts ». Terrible responsabilité que celle de nos gouvernants en période de crise. Elle aura fait craquer Agnes Buzyn.

On mesure ainsi le chemin parcouru dans nos têtes en quelques jours quand nous étions (moi le premier) encore relativement nonchalants la semaine dernière. La pédagogie sur l’impérieuse nécessité de l’écrêtement du sommet de la vague semble commencer à porter ses fruits. Il est d’ailleurs notable que la fermeture des restaurants, cafés et cinémas a sans doute eu plus d’impact psychologique sur les Français que la fermeture des écoles. Cela en dit long sur notre culture !

Chroniques du confinement JOUR 3 : première journée confinée avec les enfants

Elles avaient bruyamment sauté de joie à l’annonce de la fermeture de l’école, insouciance des enfants mais aussi signe d’un rapport dégradé à l’institution qui m’a interpellé. Mes 2 collégiennes et ma lycéenne ont vite compris que ça ne serait pas aussi marrant que prévu. Nous nous retrouvons donc dans le salon pour échanger sur les règles qui vont régir la vie familiale confinée dans les semaines à venir. 

La discussion commence de manière animée quand nous annonçons un lever autoritaire à la terrible heure de 10 heures le matin. L’indignation monte : « mais pourquoi? On n’aura rien à faire toute la journée. Si on a envie de se lever à midi… » Je réponds par un « mais on n’est pas en vacances »  jugé dérisoire et immédiatement balayé par de vives protestations. Nous devrons passer cette première mesure en utilisant le 49-3. 

La discussion sur la répartition des tâches ménagères se passe mieux. Elle accouche d’un magnifique planning coloré dont seul l’expérience pourra nous dire s’il a été efficace. Nous passons ensuite à la délicate question du temps d’écran. « Pourquoi ne pas passer toute la journée sur les écrans? » propose l’une d’elles plaçant d’emblée haut la barre de la négociation. Nous finissons par trouver un fragile compromis.

Reste maintenant à attaquer les devoirs scolaires en ligne. Malheureusement les serveurs n’ont semble-t-il pas été corona-dimensionnés. Nous parlerons donc de la pédagogie en ligne un autre jour. La journée se termine avec l’intervention d’Emmanuel Macron. On sait maintenant que ça va durer.

Chroniques du confinement JOUR 4 : comment le coronavirus donna naissance au Skype-apéro et au Zoom-apéro

Depuis le début du confinement, on ne parle que d’elles. Elles s’appellent Skype, Zoom, Whereby, Klaxoon, Discord : toutes ces applis de travail collaboratif à distance cartonnent. Il y a bien eu les bugs de la première connexion, quelques soucis de débit mais globalement ça marche et même bien. On se dit souvent que c’est aussi efficace qu’une réunion présentielle. Les réunions sont de facto raccourcies et ces outils obligent à une certaine auto-discipline ce qui n’est pas toujours le cas de la fameuse « réunion à la française ». Après l’épidémie, le travail à distance aura de beaux jours devant lui.

Malgré tout, ce chacun chez soi manque de convivialité surtout en fin de journée quand vient autre tradition bien française l’heure de l’apéro. Après les italiens chantant aux balcons, on voit apparaître sur les réseaux sociaux les apéros en visio-conférence : le Skype-apéro ou le Zoom-apéro, chacun chez soi avec ses bouteilles devant son écran d’ordinateur. La bière Corona en est bien sûr la boisson vedette. La formidable créativité humaine sous contrainte!!!

Alors vous ce soir, vous faites plutôt l’apéro chez Skype, Zoom ou Whereby à moins que vous n’enchaîniez les 3. Boire pour oublier le coronavirus mais avec modération tout de même.

Chroniques du confinement JOUR 5 : la guerre devient mondiale

Coronavirus dans le monde (source John Hopkins university)

L’épidémie s’étend dans le monde, jour après jour inexorablement. Après l’Europe, ce sont les Etats Unis qui commencent à être massivement touchés et les perspectives y semblent plutôt noires. La carte interactive de l’université américaine John Hopkins permet de suivre cette inexorable progression. Voir aussi les courbes des posts de Pierre Paperon sur Linkedin qui sont très instructives.

Les stratégies employées par les différents pays pour lutter contre la maladie sont assez différentes. Si l’Italie, l’Espagne, la France et Belgique ont opté pour le confinement, d’autres comme l’Allemagne, le Royaume Uni, les Pays Bas continuent à miser sur une stratégie dite « d’immunité collective » qui consiste à laisser se diffuser le virus afin qu’une grande partie de la population « s’auto-vaccine ».

Jusqu’à quand? C’est au nom de cette doctrine que Boris Johnson a jusqu’à présent refusé le confinement. Mais cette stratégie comporte un risque énorme si l’épidémie explose trop vite et que les hôpitaux se retrouvent submergés. 

Côté bonnes nouvelles : la Corée du Sud semble avoir réussi grâce à sa politique massive de diagnostics à enrayer l’épidémie. Une politique de diagnostics également mise en place en Allemagne et qui semble être relativement efficace. 

Cett chronique vous a plu