Le pain est mon péché mignon. Si je n’y prenais garde, je pourrais avaler une baguette entière en rentrant chez moi le soir surtout si un paquet de beurre n’est pas trop loin. Pour mon plus grand bonheur (ou malheur de ma ligne), la baguette devenue « tradition » est encore meilleure depuis quelques années. En janvier dernier, je vous contais « la tragédie de mon boulanger » mais surtout comment il avait avec talent transformé son commerce florissant. La semaine dernière, Étonnante Époque vous parlait du changement de vie des cadres devenant artisans notamment boulangers. Cela m’a donné envie de creuser ce sujet de la boulangerie. La boulangerie traditionnelle aurait pu mourir concurrencée par les grandes surfaces. Les boulangers avec la recette de la baguette tradition ont su réinventer leurs produits et leur métier. Et ça n’est pas terminé. Car en plus la baguette tradition est meilleure pour la santé.
Avant l’invention de la baguette tradition, une chute vertigineuse de la consommation de pain
La baguette tradition française : une réponse de la boulangerie traditionnelle aux grandes surfaces
Les grandes surfaces s’étaient pourtant attaquées au marché du pain avec leur recette habituelle : prix bas et produit industrialisé (la baguette entrée de gamme cote chez Leclerc à 0.29€). Vous savez ces baguettes avec une face aux petits points géométriques et qui deviennent vite caoutchouteuses. Dans ce combat inégal, on ne donnait pas cher de la boulangerie traditionnelle qui aurait pu disparaître comme de nombreux métiers . Le pain industriel à base de pâte surgelée au début des années 90 allait s’imposer irrémédiablement. Un miracle allait la sauver : la baguette tradition. Elle fête cette année ses 25 ans et représente près de 30% de la consommation de baguettes en France.
Au départ, la demande d’une baguette avec une farine sans additif
Tout commence en 1987 lorsqu’un client demande aux Minoteries Viron de lui fournir une farine sans additif, ni produit chimique permettant de retrouver le goût du pain des années 30. La baguette Retrodor naît en 1990.
En 1993, le premier Ministre Edouard Balladur promulgue le décret pain qui définit de manière stricte les critères pour pouvoir vendre du pain sous la dénomination « pain de tradition française ».
Cette baguette ne peut être composée que de 5 ingrédients : farine de blé, eau, sel, levure et levain. Pas de colorant ou d’additif chimique dans la « tradi ». Ce décret introduit également la notion de « pain maison » : les pains entièrement pétris, façonnés et cuits sur leur lieu de vente au consommateur final.
En l’an 2000, les pouvoirs publics vont encore plus loin avec la création d’une baguette de tradition française label rouge, avec notamment une exigence d’utilisation d’une farine label rouge.
Le succès de la « tradi » ne vient pas tout de suite
Au début, les consommateurs sont circonspects. Mais surtout les boulangeries ont commencé à rentrer dans l’industrialisation de leur production avec une qualité très hétérogène. La baguette tradition leur demande de revenir à un mode de fabrication plus artisanal.
Mais progressivement les mentalités changent et la « tradi » cartonne. Le pain n’est plus la nourriture de base, alors autant qu’il soit bon. Le pain est ainsi devenu l’un des rares produits alimentaires où le prix bas ne figure pas dans les trois critères d’achats principaux. Le savoir-faire de l’artisan boulanger est le critère numéro 1.
De la tradi à un marketing sophistiqué des recettes de pain traditionnel
Pourtant le modèle de Paul est largement industriel. Les fameux fours affichés à la vue du consommateur sont pour la plupart des terminaux de cuisson qui cuisent des pâtons congelés fabriqués dans les usines du groupe Holder (elles produisent également les 130.000 macarons Ladurée vendus quotidiennement). L’enseigne n’a alors pas le droit d’utiliser le nom « boulangerie ». Le consommateur n’y voit que du feu et il faut d’ailleurs reconnaître que les baguettes chaudes de chez Paul sont excellentes.
La baguette tradition a permis une transformation de la boulangerie
Vous le voyez, la boulangerie traditionnelle s’est radicalement transformée. Des cadres décident d’ailleurs de changer de vie et de devenir boulanger. La boulangerie parisienne est devenue plus qu’un point de vente. C’est un lieu de vie en phase avec les aspirations de notre étonnante époque. Moins de temps pour déjeuner : la boulangerie se métamorphose en un lieu de restauration rapide pour le déjeuner proposant sandwiches, salades et boisson.
Aspiration à la gourmandise promue par la télé-réalité : la boulangerie redevient pâtisserie et salon de thé proposant Kusmi Tea et Nespresso. Recherche d’une nourriture plus saine et plus écologique : les farines bio sont en plein développement permettant la renaissance du métier d’artisan meunier.
Après la baguette tradition, le pain de demain sans gluten, santé, farine bio…
De nouveaux nuages se présentent à l’horizon. Le régime sans gluten se développe rapidement, menace mortelle pour la baguette de pain. De quoi stimuler la créativité de la profession. Le boulanger Eric Kayser propose une gamme complète de pains sans gluten. De nouvelles céréales arrivent dans les boulangeries. C’est le pain du jour, du mois… Le pain se « boboïse » parfois jusqu’à la caricature. Ainsi le pain du mois d’avril, du même Eric Kayser s’accompagnait de la description suivante :« Un pain de mie cranberries, graines de courges et noix, pour préparer sa peau et faire le plein d’antioxydants avant l’été ».
Bref le secteur est en pleine effervescence pour le plaisir des papilles des français. Au pays de Paul Bocuse, boulangerie et baguettes ont de beaux jours devant eux… en attendant le retour du béret.
Mise à jour du 14/05/2019 : tension entre industriels de la farine et boulangers autour de la baguette tradition
Entendu ce matin sur Europe 1, tension autour de la baguette tradition entre industriels de la farine et petits artisans boulangers. Ces derniers reprochent au Banette et Baguépi… d’avoir créé vis-à-vis d’eux une relation de dépendance. Cela leur permettrait aujourd’hui de vendre aux petits artisan boulangers la farine spéciale baguette tradition à des prix prohibitifs par rapport aux boulangers industriels.
Mise à jour du 12/08/2019 : la baguette tradition d’Eric Kayser star dans la ville de New York
En vacances à New York la ville qui voulait devenir verte, je tombe par hasard sur une boulangerie Maison Kayser sur la 5ème avenue. J’en profite pour acheter une bonne baguette…. comme à la maison. Je découvre alors que je ne suis pas vraiment tombé par hasard sur cette boulangerie. Avec 16 boutiques à Manhattan et 1 à Brooklyn, Éric Kayser quadrille la Big Apple où il s’est taillé un véritable empire. Comme le vin rosé, la baguette tradition devient un produit de la mondialisation.
Mise à jour du 01/08/2020 : la baguette tradition serait meilleure pour la santé que la baguette blanche
Une enquête passionnante de la rubrique Food checking du Parisien explique pourquoi la baguette tradition est en plus meilleure pour la santé. Le fameux décret pain impose une farine sans additif contrairement aux farines utilisées pour les baguettes blanches qui utilisent des additifs pour favoriser la fermentation. Une enquête à découvrir dans la vidéo suivante s’appuyant sur les témoignages de la nutritionniste Adélaïde d’Aboville et du chef Thierry Marx.
mon boulanger vend une tradition au prix traditio qui est du pain normale
2 rue professeur devalle06000 nice